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Par Eilathan le 21 Mars 2008 à 16:28
Depuis ma poésie sur la fermeture d'Auchan sans Vodka, je n'ai pas trop joué la carte du lyrisme, alors voici une petite histoire pour m'auto-pardonner.
Elle marche en ville, Babylone la maudite aux arbres gainés de barbelés, tuyaux d'échappements, égouts et crottes de chiens.
Elle marche et le monde entier la regarde comme si elle débarquait d'un univers parallèle ou d'une autre galaxie. Il faut dire qu'elle n'a pas un visage ni des plus communs ni des plus faciles à assimiler. Sans être ni jolie ni laide elle est juste particulière, un peu trop. Rien ne l'empêche pour autant de se mettre en valeur, comme tout un chacun.
Elle marche en ville et tout le monde y va de son petit commentaire d'étonnement : la classe, la salope, qu'est ce que c'est que ça, oh les cheveux, oh les yeux, oh la silhouette, j'adore tes gestes..... Rarement d'insultes en fait, même si les mots remplis de sous entendus lubriques peuvent être une métaphore de la souffrance.
Elle marche en ville, le monde entier la regarde et trouve un prétexte quelconque pour lui parler et l'observer de plus près, une seconde de plus : une cigarette, une question, du feu, un coup à boire, elle doit sûrement expliquer à trois phocéen par jour où se trouve Le Vieux Port...
Non sans complexe elle finit par s'y habituer, mais devient parfois agressive au bout d'un certain laps de temps d'accostage, de décrie et d'observation à outrance.
Elle a du souhaiter une fois, étant enfant ou dans une autre vie, être remarquée. Le mal est fait, elle doit purger sa peine et se racheter une conduite sans jamais pouvoir passer inaperçue jusqu'à sa mort.
Ses pas rythment le son de la ville, son claquement de talon, même lui, est bien spécifique, soulevant à chaque fois une fine poussière de chaleur et de crasse.
Elle passe au carrefour de quatre rues et le soleil embrase son énorme et longue tignasse, ni rousse, ni blonde, ni châtain, juste un peu improbable mais parfaitement reconnaissable parmi les quelques 800 000 autres habitants de Babylone.
Dans l'antiquité, au moyen âge, au 18ème siècle, en Afrique, à la guerre ... elle serait morte.
Elle dépasse le carrefour et tombe nez à nez sur un fourgon de CRS. Les hommes en uniformes l'observent déjà tous, un mauvais rictus en coin de bouche. Ils sont cinq, et se ressemblent tous, sans vraiment de distinction particulière hormis l'ordre dans lequel ils interviennent.
Le premier qui lui parle lui demande ses papiers, elle s'arrête et lui fournit. Le second lui demande de le suivre, elle obtempère mais commence à douter du bien fondé de cette histoire. Le troisième lui demande de monter dans le camion, elle refuse. Le quatrième la menace, elle s'insurge : après tout vont-ils l'arrêter pour non outrage, non fumage de joints, non état d'ébriété ... ou plutôt pour « non mochage, non grossage et non insipidité » ? Le cinquième l'attrape par le col et l'oblige à monter.
Le voyage...
Le camion s'arrête aux feux rouges et le monde entier tourne la tête pour la regarder, elle baisse le front mais peu importe, sa fourrure étincelante la trahit. Ils sentent le sol malgré les amortisseurs, roulant des flots de nids de poules, qui s'étendent comme un boa sur la ville entière.
Le premier CRS la regarde sans arrêt grâce au rétroviseur, le second s'est tourné pour l'observer. Le troisième tient son visage relevé en lui pinçant le menton, le quatrième prend des clichés « pour souvenir », le cinquième lui pose des questions, tout à la fois fasciné et rebuté par ce qu'il voit : « Qui es tu ? D'où viens tu ? Pourquoi es tu comme ça ? »
Les six roulent dans la chaleur de la ville, Babylone la maudite aux millions de cafards, de rats, clochards voulus et ivrognes innocents.
Le camion roule encore et beaucoup trop jusqu'à une blanche bâtisse à l'extérieur de la ville, dont la chaux encore fraîche attise le miroitement caniculaire.
Le camion s'ouvre : un homme en blouse blanche entre en scène, accompagné de deux autres à la mine patibulaire, agents de sécurité à en juger par l'inscription sur leur chemise. Les trois ont la même expression d'étonnement, les yeux exorbités, les traits tirés et la bouche vaguement béate. Ils contemplent sans politesse son visage extraterrestre dont les yeux en constituent un bon tiers.
Ils la font sortir de force, tout en la bousculant, et l'entraînent vers la bouche étroite mais béante d'un couloir blanc à la longueur titanesque. Ses yeux meurtris mettent un certain temps à s'accoutumer à la lumière des nombreux néons. Elle a le vertige en s'apercevant que le fond n'est pas visible.
Il y des portes tout le long du couloir et la marche jusqu'à celle qui s'ouvrira pour se refermer à jamais doit atteindre un kilomètre entier d'uniformité, de froideur et d'immensité.
Aucun son n'est audible mis à part la cadence de marche parfaitement carrée des trois hommes et le contretemps crée par les talons de la créature. Un courant alternatif porte ce flot de silence. Pas un souffle, juste un écho revenant du lointain fin fond. Elle pense un instant à son père qui était psychiatre et pratiquait la thérapie par le cri dans un cabinet jouxtant sa chambre. Elle préfère encore ça au silence.
Enfin la porte. Elle s'ouvre sur un local qui ressemble à s'y méprendre à son appartement : rouge, noir, argent, moderne, antique, classique, cybernétique, commun et original.
La porte se referme et elle se retrouve seule, dans un chez elle qui n'est pas chez elle mais sera sa tombe à coups sur. Tout est pareil, jusqu'aux livres et leurs années de parutions, les données dans l'ordinateur, les films dans la pochette, les vêtements, la vaisselle, tout ... Que dire sauf que son mode de vie a du spécialement être étudié ?
Tout est pareil mis à part les caméras intégrées ci et là aux plafonds et aux murs. Elle commence à comprendre, elle en avait vaguement entendu parler. Alors elle se regarde longuement dans le miroir. En pleurant ses yeux deviennent encore plus verts, quasi fluorescents.
Ils vont aimer ça.
En pianotant sur son clavier de ses longs doits tordus et onglus voire griffus, elle était tombée sur une conversation intégrée dans le script d'une page web. Un garçon était né avec les cheveux naturellement rouges, et les yeux auburn. Son physique particulier et l'étrange prestance dont il faisait de plus en plus preuve en grandissant avaient amené les autorités à engager certaines expériences sur lui. Ainsi avait été crée une sorte de ministère des personnalités hybrides. Avec le temps, la police du karma avait été capable de ramener jusqu'à la tentaculaire Babylone bon nombre de spécimens des quatre coins du globe.
Elle n'avait pas pensé être assez spéciale pour cela, et ne s'était jamais caché. Ses gènes bizarrement entrecoupés la menaient vers sa propre perte. Ses gestes seraient filmés et retransmis aux chercheurs du monde entier, ainsi qu'à certains milliardaires qui souhaitaient étancher leur soif d'étrangeté.
Sans plus converser avec qui que ce soit, elle serait observée plus que jamais dans un coin retranché de la ville maudite, cette ville même ou quelques heures plus tôt elle marchait, faisant fi des remarques incessantes des gens qui avaient le droit de vivre libre, ces gens qui sont tous fait du même moule, et qui n'existent pas.
Les rares à exister encore vivent seuls, tout autour d'elle, derrière chacune des portes de cet enfer lumineux et infini.Evidemment le premier qui dit que mon héroïne aurait pu survivre normalement en coupant et colorant ses cheveux en noir et en se nourrissant de hamburgers tous les jours aura droit à une claque.
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Par Eilathan le 21 Mars 2008 à 16:24
Comme une envie de mass-murder depuis ce matin, tout m'énerve, les gens m'énervent, je vais faire une reprise de Britney Spears version Red Right Hand-American-Psycho.
Je l'entends déjà :
yeah yeah yeah yeah yeah
yeah yeah yeah yeah yeah yeahi think i did it again
i made you believe
that we were real friends
oh baby
it might seem like a crush
but it doesn't mean
that i'm not nervous
cause to lose all my senses
that is just so typically me
oh baby babyCHORUS:
oops i did it again
i drown out your heart
with big shinny blade
oh baby baby
oops!...you think you'll be saved
But I kill full of hate
i 'm not that innocentyou see your problem is this
i'll send you away
wishing that paradise truly exist
i strangle every day
can't you see i'm a psycho
in so many ways
but to lose all my senses
that is just so typically me
oh baby babyREPEAT CHORUS:
yeah yeah yeah yeah yeah yeah
yeah yeah yeah yeah yeah yeah"all aboard"
"baby before you go, there's something i want you to have"
"oh its beautiful, but wait a minute, isnt this... ?"
"yes it's a blade"
"but i thought it's a joke and you'll let me live at the end"
"well baby, i can"t do it for you"
"oh you should do"oops!... i did it again to your life
got lost and burn in hell, baby
oops!... you think you'll be saved but you"re wrong
im not that innocent
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Par Eilathan le 19 Mars 2008 à 19:51
J'aurais du être un garçon riche et gay
<?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>De la fin du 19ème siècle jusqu'au début des années 2000, on était beatnik, London style, bourgeois ou prolétaire, artiste ou ouvrier, hyppie, intello ou bimbo, de droite ou de gauche et j'en passe.
Il suffisait d'être, d'avoir l'éducation propre aux économies pas encore mondialistes, éduqué avec un accès à l'information et à la culture assez limités. Même si tout cela réduisait la capacité à être « nous », une part de génie et un peu de travail suffisaient à sortir du lot.
<o:p> </o:p>De nos jours, les hypes de droite, les bobos, techtonik, profs de français-Nothomb-jupe-longue-association loi 1901, metalleux black ou thrash ou glam ou goth induisant une éthique systématiquement différente, trendy LA ou London, dreadeux-teufs-chiens, punk... tout semble déjà aussi dérivé qu'une collection printemps-été de chez Kenzo.
<o:p> </o:p>Par conséquent, vu le choix possible devant lequel on se trouve, celui qui n'entre pas dans le style (prononcer à l'américaine : staïle) est soit beauf, soit dépressif soit artiste introverti soit rien du tout. Peu importe la part de son génie, la taille de son ego, le fait qu'il puisse se créer une culture spécifique quasi gratuitement, il sera out-la-society.
<o:p> </o:p>Logiquement, j'aime l'image, j'ai un master 2 de Communication, je suis alcoolique, toxico, un peu rebelle et thrash mais sans plus, pas spécialement passionnée d'une culture autre que la mienne, j'aurais du être un garçon riche et gay. Je suis une fille middle class, hétéro et fidèle. Je n'ai l'opportunité que du « rien du tout ».
<o:p> </o:p>C'était la pensée pessimiste du jour.
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Par Eilathan le 16 Mars 2008 à 15:29
Le problème avec le fait d'être dans la middle class, c'est qu'on gagne trop d'argent pour pouvoir se plaindre, mais qu'on n'en gagne pas assez pour en être dégouté.
La solution serait de se contenter de ce que l'on a sans vouloir plus et sans pleurnicher.
Comme si c'était possible !
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Par Eilathan le 16 Mars 2008 à 11:23
J'ai vu <?xml:namespace prefix = st1 ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:smarttags" /><st1:metricconverter w:st="on" ProductID="99F">99F</st1:metricconverter>, je ne pensais pas être emballée à ce point. Dujardin, dans "bienvenue chez les rozes" et même dans "oss 117", a l'air moins con que lorsqu'il incarne un incrédible surfer blond vivant sur la côte d'azur, mais quand même, le mixe improbable du réalisateur, de l'écrivain et de l'acteur principal me faisait penser à une mauvaise blague. Que Nenni ! Kounen, qui ressemble à un mélange de HPG et l'idée que je me faisais de Gaspar Noé, s'en est particulièrement bien sorti, comme d'habitude. Mieux que d'habitude. Dur de montrer les effets d'un ecstasy. C'est certes un peu abusé mais assez réaliste. Comment je le sais? Hum... une réponse à <st1:PersonName w:st="on" ProductID="la Gainsgarre">la Gainsgarre</st1:PersonName> sera de mise. No comment. Dujardin en Beigbeder, il fallait le concevoir, même dans un cerveau si défoncé qu'il soit. Et pourtant, il en vient à lui ressembler physiquement. Dujardin semble intelligent toute la durée du film, j'en conclue qu'il est très bon acteur ...
Vendredi soir j'étais encore soule. Il y avait pas mal de monde chez moi, metal en fond, point ragoûtant mais juste assez pour échapper au sempiternel lounge technoide ou autre Gothan Project. Les divers rideaux de lumière, lampes à bulles, éclairage de vitrine et bougies étaient au rendez vous. Dommage, une fois de plus il n'y avait pas de cocaïne, mais je crois que ça n'intéresse que moi. Par contre le litre de vodka rapporté fièrement du Casino un jour plus tôt y est passé. Lorsque je bois je m'écoute parler pendant des heures sur un même sujet. Je dis toujours la même chose, radotant au maximum comme une longue, très longue branlette. Et le plus ironique dans tout ça n'est pas qu'on puisse supporter mon flot incessant de conneries, ni qu'on puisse réellement l'écouter, ni même encore qu'on continue de me servir à boire. Non, le plus hallucinant est qu'on m'invite le lendemain, pour le même genre de soirée, mais ailleurs. Je n'ai aucune explication, c'est peut être un nouveau genre de masochisme. Si on ajoute sur ce point le fait de ne pas pouvoir m'empêcher de dire naturellement tout ce que je pense, je devrais être socialement morte et enterrée, ou paraplégique car le bon sens voudrait qu'on me défenestre.
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